lundi 23 octobre 2017

Gazette de Pernon

Hier soir, jusque très tard, nous avons encore une fois retourné le problème de Pernon dans tous les sens, et la conclusion est toujours la même : avec l’âge, il est temps de passer à autre chose de plus modeste. L’entretien permanent que nécessite une “propriété” comme celle-là requiert trop de temps et d’efforts — même si nous pouvons faire faire certains gros travaux, comme nous le faisons déjà. D’autre part, l’isolement qui a longtemps constitué un avantage pour nous devient et deviendra de plus en plus un iconvénient — sans même parler de l’hypothèse de la disparition de l’un de nous, que les Parques ont, de toutes façons, déjà programmée !
J’ai donc envoyé ce matin même un “SMS” à Bruno C. en lui disant que nous souhaitons le voir rapidement, maintenant que nous sommes rentrés. Pourvu qu’il n’ait pas changé d’avis ! Car il est de plus en plus évident que vendre une maison comme la nôtre n’est pas si facile… et que plus le temps passera, plus ce le sera.
Si cela se fait, nous allons avoir au moins trois mois difficiles : nous débarrasser de toute ce qui n’est pas indispensable, préparer le déménagement, chercher un appartement…
Le lieu de nos recherches sera finalement comme prévu depuis un moment, à Toulouse.
Pour ma part, j’eusse préféré Ajaccio, mais c’est une ville un peu trop petite pour Mireille, et surtout trop éloignée d’Isabelle et Clémence… Malgré notre expérience plutôt négative de l’an dernier, Ajaccio, pour moi, existe  : c’est un port, je peux aller rêvasser sur un banc devant la mer comme je le faisais souvent… Toulouse est une ville agréable en terrasse, mais c’est pour moi un no-man’s-land “multiculturel” et communautariste, et certainement pas un lieu qui puisse me faire rêver ! Toulouse, pour moi, c’est comme Reims : quelques beaux monuments, mais aucune existence dans mon imaginaire ! Rien qui puisse me faire envie.
Jusqu’ici, l’administration avait toujours décidé pour nous, en nous attribuant des “postes” dans des endroits que nous n’avions pas demandés, ni l’un ni l’autre : Évreux, Donges, St-Nazaire, Redon, Vitré, Langon… Encore avons-nous décidé de nous établir à Nantes, plutôt qu’à Donges ou St-Nazaire ! Au point même d’y avoir acheté un appartement., et comme c’est là que j’ai réussi à pénétrer dans la forteresse de la Faculté… c’est là que nous sommes demeurés le plus longtemps, alors que Mireille, elle, sautait d’un poste à un autre.
Quand nous avons pu choisir vraiment, ce fut pour aller dans des pays “étranges” : le Maroc, — et Agadir, a compté énormément pour nous, puis Mayotte, et enfin la Nouvelle-Calédonie, où pour la première fois, nous avons pu vraiment choisir jusqu’à la ville elle-même  ! Mais ce ne fut que temporaire… Peut-être aurions-nous dû y rester, au fond, même avec des conditions bien moins intéressantes : la mer y était si belle et si chaude !
Alors après tout cela, Toulouse… c’est pour moi comme une “maison de retraite” !
Mais sur ma machine, au moins, je suis partout, et n’importe où. Les seuls amis importants pour moi, intellectuellement s’entend, c’est sur “La Toile” que je les ai rencontrés, ou grâce à elle que je les ai conservés : des amis numériques, en somme, un peu comme pour mes livres…
Je vais donc faire l’expérience, de nouveau, d’un lieu dans lequel je ne serai pas vraiment concerné, mais qui, en me débarrassant de tas de corvées devenues lassantes et trop lourdes, à la longue, me permettra du moins de me consacrer le plus longtemps que je pourrai à ce que j’aime vraiment.
Puisque “vieillir c’est rétrécir” — selon mon adage — il faut bien “s’arranger”, émonder tout ce qui n’est pas vraiment indispensable, et conserver l’essentiel.

Pernon est vendue !

Je laisse “pour mémoire” toute mes supputations précédentes…
Mais maintenant, c’est terminé : nous venons de vendre la maison.

Bruno est revenu avec son fils, la femme de celui-ci, et leur petite fille de quelques mois, très mignonne. Nous leur avons fait visiter la maison ; elle leur a plu. Ils avaient amené une bouteille que nous avons partagée pour sceller la vente…

Voilà. c’est fait. Enfin.

Je suis content, parce que vendre Pernon à des jeunes gens aussi sympathiques, c’est pour moi comme un passage de relais en quelque sorte  : ils sont jeunes, ont beaucoup d’amis et de famille dans la région… je suis certain que la maison correspond à ce dont ils ont besoin, qu’ils vont y être heureux longtemps — c’est bien !

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Ce soir, pas de Hegel ni d’Arioste.
Mais demain, je reprendrai. Et malgré le travail énorme qui nous attend pour faire le vide… je poursuivrai ce journal et mes traduction : pour moi, c’est vital.